[Report] Bourges Off 2006 - System 18, PH4, R1T, Subsonik,

Finalement, la rave interdite aura eu lieu sur le site prévu, les fêtards ayant eu raison des atermoiements préfectoraux (nos éditions précédentes). En forme de répétition générale avant le teknival du week-end prochain.

Au plus fort de la rave de Lazenay, ce week-end, le nombre de fêtards convergeant de toute la France – surtout du Berry et du Grand-Ouest – est monté à 4.000, dans la nuit de samedi à dimanche. 1.100 véhicules sont passés par le contrôle draconien de la gendarmerie, au rond-point de Lazenay, sorte de sésame pour accéder à la petite route, à deux pas de Reuilly (Indre), menant à la jachère de « Grange-Neuve » où se tenait la « free rave » d'avant-Printemps.
Enfin « libre » ou « sauvage », façon de parler tant cette rave interdite se sera imposée d'elle-même, avant le teknival autorisé par la préfecture à Chavannes, le week-end prochain. « Cette rave-party de Lazenay n'est ni autorisée, ni interdite, nous avons à gérer une situation de fait avec comme objectif numéro 1 de préparer le teknival de Chavannes », confirmait, sur place, Philippe Levesque, sous-préfet de Vierzon. « Le Sarkoval ne nous a pas eus », se targuait, de son côté, un « lascar » du Morbihan…
Vendredi soir, les autorités ont donc dû se rendre à l'évidence devant les 400 véhicules qui tournaient dans la région de Bourges. Avec, au final, un feu vert négocié avec les organisateurs éconduits dans la semaine. « La crainte que les gens restent sur le parking du bowling nous a permis de négocier. On doit éteindre la musique dimanche à 15 h, puis nettoyer le site, avant de le quitter au plus tard lundi midi », résumait, samedi, Gérald, de System 18, l'association organisatrice, soulagé car « cela faisait quatre mois que nous bossions sur la rave ».
Cette « teuf » n'était ici qu'un secret de polichinelle depuis plusieurs jours. Mais pour les fermiers de « Grange-Neuve », Roland Blanchard et son épouse qui louent les bâtiments et terres au couple Ragot, ce fut la surprise. A 2 h, dans la nuit de vendredi à samedi, un coup de fil des gendarmes les avertissait du « débarquement » sur leurs 40 ha en jachère. Le défilé de camionnettes de son et de voitures, de gamins en kaki et de chiens, a alors commencé pour atteindre une pointe, samedi, vers 21 h. Cinq gros murs de son ont fait la joie des raveurs. « Je me sens beaucoup plus en sécurité dans une rave qu'en sortie de boîte à Bourges », confiait Céline, une Sancerroise. « Oui, ici l'esprit est “ roots ”, c'est-à-dire libre, bercé par la musique, sans prise de tête », ajoutait Didier, 23 ans, du Jura, huit ans de raves à son actif. Tout près de là, l'association orléanaise Auto support et réduction des risques parmi les usagers de drogues (Asud) accomplissait son œuvre de prévention.

Un agriculteur envisage de déposer plainte

« Roots » ? Pas chez Jérôme Francheterre, passablement énervé par les intrusions à répétition sur ses 30 ha de blé voisins. « C'est une propriété privée, je n'ai même pas été avisé par les élus. Je vais déposer plainte, y compris contre des élus », s'emportait l'agriculteur des « Cabarderies », à Lazenay.
Côté sécurité, gros dispositif, une centaine de gendarmes ont quadrillé le secteur, dont l'escadron de la gendarmerie mobile de Pithiviers (Loiret) qui fut présent à l'immense « Tek'Noz » de Carnoët (Côtes-d'Armor), en juin 2005, où une jeune femme de 18 ans avait été tuée de plusieurs coups de couteau. Autour du capitaine Gilles Lavaux, commandant la compagnie de Vierzon, les gendarmes du Cher ont contrôlé des véhicules sur réquisition du procureur avec, au final, de petites saisies de stupéfiants.
Chez les trente sapeurs-pompiers, le PC commandé par David Sarrazin a surtout fait de la « bobologie ». Une soixantaine de passages ont été comptabilisés sous les tentes du poste médical avancé. Sur les deux jours, trois jeunes ont été évacués vers des hôpitaux, dont un qui a dû être intubé par le Smur, il était inconscient probablement après un « mauvais mélange » et faisait des pauses respiratoires pour avoir inhalé son vomi. Hier, son état était jugé meilleur.
La Ddass était présente sur les lieux samedi, alors qu'était distribuée de l'eau, en raison des premières chaleurs. Car il a fait un vrai temps de rave, à Lazenay, ce week-end… les premiers « teufeurs » repartant hier, bien sagement, au compte-gouttes, comme ils étaient venus, après avoir arrêté, avant l'heure promise même, à 13 h 15, les « boom-boom » de ces immenses murs amplifiés que l'on percevait de nuit, jusqu'à Massay. Hier, vers 19 h, ils étaient encore près de 200 sur le site, émergeant lentement d'un long week-end de fête.

la Nouvelle republique 24/04/06